La Presse
Outré qu'Immigration Canada ait refusé de délivrer des visas à deux de ses employés du Nigeria, Médecins sans frontières Canada demande à la ministre Diane Finley de corriger la situation et de revoir au plus vite la politique de délivrance de visas «qui paraît - aux yeux de plusieurs - raciste à l'endroit de travailleurs humanitaires réputés» originaires d'Afrique, selon l'organisation.
«On entend toujours des organismes humanitaires, académiques et culturels canadiens qui ont de la difficulté à obtenir des visas pour des Africains. Ce n'est jamais le cas pour les Asiatiques. Il y a là matière à réflexion», s'est écriée hier la directrice des communications de Médecins sans frontières (MSF) Canada, Avril Benoît.
Un an après s'être battu bec et ongles pour que cinq de ses employés africains obtiennent des visas pour assister à la Conférence internationale sur le sida, à Toronto, MSF n'a pas digéré d'apprendre lundi que le haut-commissariat du Canada à Lagos a rejeté la demande de permis de résidence temporaire de Macaulay Kofoworola et du docteur Igbin Ayoola Ahmed, «deux étoiles montantes dans notre programme au Nigeria», selon Mme Benoît.
Les deux travailleurs humanitaires, qui sont des employés salariés de MSF depuis plusieurs années, doivent donner une conférence à Montréal sur un projet avant-gardiste de lutte contre le VIH, à l'occasion de l'assemblée annuelle de l'organisation, qui se tiendra du 15 au 17 juin.
MSF et ses deux employés nigérians ont dû fournir une kyrielle de documents (talons de chèques de paie, détails sur la famille, relevés bancaires, preuves de propriété foncière) au gouvernement canadien lors de la demande des visas. Dans la lettre de refus, le haut-commissariat a rejeté la demande de M. Ahmed en prétextant que la traite bancaire qui y était attachée n'était pas valable. Dans le cas de M. Kofoworola, l'agent d'immigration a dit ne pas être convaincu que ce dernier retournerait au Nigeria après la conférence.
«Les raisons du rejet sont très discutables dans les deux cas, notamment parce que la traite bancaire a été acceptée pour un des deux employés et non pour l'autre», a écrit la directrice des communications de MSF, dans une missive envoyée mardi à la ministre de l'Immigration.
En plus de demander une rencontre avec Mme Finley afin de discuter des problèmes récurrents d'obtention de visas pour son personnel africain, l'organisation humanitaire l'invite à délivrer rapidement un permis ministériel pour que les deux hommes puissent assister à la conférence.
«Il est regrettable que le gouvernement canadien bloque notre travail sur le terrain, qui est basé sur l'échange d'information entre nos employés canadiens et ceux qui proviennent des pays où nous avons nos programmes», a souligné Mme Benoît.
L'aile canadienne de MSF gère des missions d'aide humanitaire au Nigeria, en Côte-d'Ivoire, au Congo-Brazzaville, en Colombie et en Haïti.
Joint par La Presse hier, l'attaché de presse de la ministre fédérale de l'Immigration a noté qu'il ne pouvait divulguer aucune information sur les cas des deux Nigérians pour des raisons de confidentialité. «Le mérite de chaque cas est étudié individuellement, et il incombe aux demandeurs de démontrer aux agents d'immigration qu'ils ne comptent pas rester au Canada», a souligné Philippe Mailhot.
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