5 février 2007
En tant que femmes racialisées et migrantes, nous sommes outrées devant l’infâmante propagande xénophobe et raciste articulée dans le cadre du débat autour des « accommodements raisonnables ».
En tant qu’actrices à part entières, affirmant notre capacité à nous auto-déterminer, nous rejetons le discours paternaliste et fondamentalement misogyne répétant la nécessité que les structures de l’État nous protègent et nous sauvent de nos propres cultures.
Nous affirmons qu’un tel discours est à la fois raciste et sexiste : raciste, car il perpétue la notion que nos cultures sont foncièrement rétrogrades et barbares, en contraste avec la culture blanche et occidentale, envisagée comme forme ultime de civilisation et de progrès; et sexiste, car provenant d’une perspective qui tend à infantiliser les femmes, ou celles-ci sont perçues comme de simples victimes incapables d’oeuvrer à leur propre bien-être.
Cette notion de « civilisation » est intrinsèquement liée à la rhétorique coloniale qui a mené au génocide des populations autochtones des Amériques, un génocide qui perdure jusqu’à ce jour, alors que la disparition de plus de cinq cent femmes autochtones au Canada continue d’être traité avec mépris et indifférence, réduit á un simple fait divers.
Nous rejetons le modèle simpliste et réductionniste de conception des « droits » des femmes véhiculé dans les médias de masse. Alors que nous réclamons activement nos « droits » à la liberté, à la sécurité, à la dignité tels qu’articulés dans le paradigme traditionnel des « droits humains », nous réclamons tout autant nos « droits » à l’expression de nos identités culturelles et religieuses.
Nous célébrons la diversité et le caractère dynamique de nos cultures et de nos identités, notamment nos identités sexuelles – en tant que femmes, et en tant que lesbiennes, bisexuelles, transexuelles ou toute autre forme d’auto-identification - et refusons la caricature simpliste et schématique réduisant nos multiples communautés à des représentations uniques, homogènes et incontestées d’une tradition monolithique.
À cet égard, nous réaffirmons le caractère dynamique des différentes manifestations de croyances ou d’identités culturelles alors qu’elles se recoupent avec un contexte politique et social extérieur plus large.
En particulier, nous insistons que l’analyse de l’oppression des femmes et de l’inégalité des sexes telle qu’exprimée dans les médias de masses, c'est-à-dire comme phénomène strictement interne aux religions ignore explicitement les systèmes extérieurs universels de patriarcat et de sexisme auxquels toutes les femmes font face, tout en homogénéisant et en fossilisant les religions de manière définitive.
Nous dénonçons le rôle de l’État et de ses structures dans la marginalisation des femmes racialisées et migrantes, qu’elles soient de foi ou non.
L’action de l’État et du système capitaliste contribuent à rendre le statut des femmes migrantes plus précaire en multipliant les barrières à l’obtention d’un statut légal, en cautionnant les différentes formes de discrimination systémique et en décuplant la criminalisation des femmes, accentuent leur vulnérabilité.
Nous dénonçons également la complicité du discours féministe impéraliste qui, sous couvert de solidarité, impose des conceptions eurocentristes et assimilationnistes d’égalité des sexes. Nous sommes critiques du paradigme féministe dominant qui place les choix des femmes occidentales comme l’unique et ultime chemin vers la libération des femmes, malgré l’accablante réalité que les femmes en Occident font face à un sexisme quotidien.
Nous sommes conscientes de la manière dont ce discours a été, et continue d’être manipulé et instrumentalisé par la machine de propagande pro-guerre et anti-immigrante.
Nous reconnaissons la continuité historique de l’appropriation et de la manipulation du discours féministe par les mouvements colonialistes et impérialistes à travers le monde.
Toutefois, nous ne sommes pas partisanes du relativisme culturel qui tend à justifier des pratiques oppressives et injustes au nom de la « différence » et restons vigilantes afin que la liberté de religions ne nous empêche pas de lutter activement contre l’oppression.
Afin d’adopter une authentique position de solidarité, nous devons écouter les femmes que nous prétendons soutenir dans leurs luttes et comprendre que nous occupons différentes positions de privilège et de pouvoir.
Pour ce faire, nous devons activement lutter contre la déshumanisation des communautés racialisées et de foi et contre la victimisation des femmes. Nous devons soutenir les femmes qui sont à l’avant plan de leurs propres luttes de libération et les actrices de leur propre transformation. Nous devons nous engager dans ce processus non pas motivées par la pitié ou la charité, mais animées d’un véritable sens de solidarité et de respect.
-- Personne N’est Illégal-Montréal
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