Sunday, February 18, 2007

Emprisonnement de présumé terroriste

Manifestation à Montréal
Presse Canadienne - Patrice Bergeron - 17/02/2007

Un peu plus d'une centaine de manifestants ont demandé samedi après-midi à Montréal la libération des deux derniers suspects détenus dans une prison canadienne pour terrorisme présumé, en vertu d'un certificat fédéral de sécurité.

Devant une foule bigarrée rassemblée par une coalition au centre-ville, des orateurs tels que la dirigeante du parti Québec solidaire, Françoise David, et Adil Charkaoui, lui-même menacé de déportation au Maroc, ont exigé la libération de Mahmoud Jaballah et Hassan Almrei, emprisonnés pour une période indéterminée au Centre de surveillance de l'immigration de Kingston (CSIK), en Ontario, un «bagne des temps modernes» qu'il faut fermer selon eux.

Les manifestants qui ont entamé une marche ont aussi célébré la libération de Mohammad Mahjoub à la suite d'une décision de la Cour fédérale jeudi.

Cinq personnes, Mahmoud Jaballah, Hassan Almrei, Mohammad Mahjoub, Adil Charkaoui et Mohammed Harkat sont actuellement sous le coup d'un certificat de sécurité au Canada pour de présumées activités terroristes et deux d'entre elles, Mahmoud Jaballah et Hassan Almrei, demeurent détenues. Le certificat de sécurité est établi en fonction des renseignements du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS).

Aucun des suspects n'est accusé de crime. Ils sont plutôt accusés en vertu de la loi sur l'Immigration et menacés de déportation, ce à quoi ils s'opposent par crainte d'être torturés dans leurs pays d'origine.

«La question du terrorisme a été instrumentalisée par le gouvernement pour se justifier pour la non participation à la guerre en Irak, a déclaré Adil Charkaoui, qui a été libéré il y a deux ans, sous des conditions strictes. La signature de certificats de sécurité contre des citoyens d'origine arabe et musulmans est injustifiable.»

Il a réclamé la libération de Mahmoud Jaballah et Hassan Almrei et le droit d'être traduit devant des tribunaux.

De même, il a exigé l'abolition des certificats et la fermeture du CSIK, qu'il a qualifié de «symbole de l'injustice», «une sorte de goulag», un «Guantanamo du Nord», en référence à la base américaine située à Cuba, où sont parqués des combattants et suspects arrêtés dans le cadre de la «guerre contre le terrorisme».

Il a aussi revendiqué la mise sur pied d'une commission d'enquête «pour que le public sache ce qui a justifié ces abus».

Au dire de la leader de Québec solidaire, Françoise David, si on est citoyen canadien, on a droit à un procès juste et équitable, si on ne l'est pas, on n'a pas de procès. Elle a reconnu avoir «un peu honte» en ce 25e anniversaire de la Charte canadienne des droits et libertés.

«Durant la prochaine campagne fédérale, il va falloir mettre tout le poids de tous les progressistes du Québec pour dire qu'on ne veut pas de cette justice à deux vitesses au Canada. La population ne s'en rend pas tout à fait compte parce que l'information sort au compte-goutte.»

La Cour fédérale a statué jeudi que Mohammad Mahjoub doit être libéré de prison pendant la révision de son dossier. Soupçonné d'être un agent d'al-Qaïda, l'Égyptien a été arrêté pour la première fois en 2000 et a déjà admis avoir géré des activités agricoles pour Oussama ben Laden, le chef du groupe terroriste à l'origine des attentats du 11 septembre.

Mahmoud Jaballah est détenu depuis août 2001 et Hassan Almrei depuis octobre de la même année. M. Jaballah est un Égyptien soupçonné d'être un agent d'al-Qaïda et d'avoir joué un rôle de contact dans les attentats contre des ambassades américaines en 1998. M. Almrei est un Syrien qui a admis avoir séjourné dans des camps d'entraînement en Afghanistan. Une décision devrait être rendue dans le cas d'un d'entre eux prochainement.

Adil Charkaoui et Mohammed Harkat ont réussi à obtenir une libération sous caution en se soumettant à des conditions très sévères. Ils sont soupçonnés d'être liés à al-Qaïda et d'avoir été formés en Afghanistan.

La Cour suprême se penche actuellement sur la constitutionnalité des certificats de sécurité.